Article de Guide : Maîtriser la Grammaire et le Style à l'Université
La transition entre le lycée et l'université exige une maîtrise plus fine et plus consciente de la langue française. La grammaire et le style ne sont plus de simples règles à appliquer, mais de véritables outils d'analyse et de persuasion pour vos écrits académiques. Ce guide vous aidera à revisiter ces notions sous un angle critique.
Questions et Réponses
Q : En quoi la grammaire est-elle importante dans une dissertation ou un commentaire de texte ?
R : Elle est fondamentale. Une grammaire correcte assure la clarté et la précision de votre pensée. Elle renforce la crédibilité de votre argumentation (un texte plein de fautes est difficile à prendre au sérieux) et vous permet d'exprimer des nuances d'analyse complexes.
Q : Dois-je bannir le "je" de mes copies ?
R : Pas nécessairement. Tout dépend des consignes. Dans une dissertation très classique, on préfère le "nous" de modestie ou des tournures impersonnelles ("il faut remarquer que", "on peut constater"). Cependant, dans un commentaire composé ou une analyse personnelle, l'usage du "je" ("je montrerai", "j'analyserai") est souvent accepté, voire encouragé, pour assumer son point de vue. Demandez toujours à votre enseignant.
Q : Qu'est-ce qu'un style "universitaire" ?
R : C'est un style qui privilégie la précision du vocabulaire, la complexité maîtrisée des phrases (variation entre phrases simples et complexes) et la rigueur de l'argumentation. Il faut éviter le langage trop familier, les clichés et les generalizations.
Questions de Critique et d'Évaluation d'Opinion
La règle de proximité (accorder le participe passé avec le sujet le plus proche, ex: "les fleurs et le lilas embaumé") est-elle une alternative valable au masculin générique ? Cet usage, bien que historique, est-il perçu comme stylistiquement élégant ou comme une faute aujourd'hui ?
L'imparfait du subjonctif dans un texte académique moderne : marque-t-il une élégance stylistique et une maîtrise de la langue, ou alourdit-il inutilement le texte au point de paraître affecté ?
L'usage modéré de la ponctuation expressive (points d'exclamation, points de suspension) dans une argumentation : affaiblit-il la rigueur scientifique ou peut-il, au contraire, servir l'émotion et convaincre ?
Questions d'Analyse d'Opinion et d'Arguments
Argument pour un style simple : "Les phrases courtes et la syntaxe directe sont toujours préférables car elles garantissent la clarté et sont accessibles à tous. La complexité est souvent le masque d'une pensée confuse."
Analyse : Cet argument valorise l'efficacité communicationnelle. Il s'appuie sur un principe de démocratisation du savoir. Cependant, il pourrait négliger la capacité de la syntaxe complexe à exprimer des relations logiques subtiles (cause, conséquence, concession) indispensables à l'analyse fine.
Argument pour un style riche : "Maîtriser les subtilités des modes (subjonctif, conditionnel) et les propositions subordonnées est essentiel pour formuler une argumentation nuancée, hypothétique et critique, ce qui est le cœur du travail universitaire."
Analyse : Cet argument lie directement la forme linguistique à la profondeur de la pensée. Il suppose que la complexité de la pensée exige une complexité syntaxique. Le risque est de tomber dans le style alambiqué et illisible si cette complexité n'est pas parfaitement maîtrisée.
Questions de Synthèse et d'Évaluation
Synthèse : La querelle entre style simple et style complexe semble indépassable. Pourtant, la synthèse réside peut-être dans l'adéquation entre la forme et le fond. Le style doit être au service de l'idée. Une idée simple mérite une phrase simple ; une analyse complexe peut nécessiter une structure de phrase plus élaborée. La vraie maîtrise est de savoir varier les structures pour éviter la monotonie et épouser le mouvement de sa pensée.
Évaluation : Le meilleur style universitaire est sans doute celui qui se fait oublier au profit des idées qu'il porte. Il allie correction grammaticale (non-négociable), variété syntaxique (éviter les phrases toujours construites sur le même modèle sujet-verbe-complément) et précision lexicale. Il évite autant les lourdeurs inutiles que les simplifications excessives.
Conseils
Relisez-vous à haute voix : C'est le meilleur moyen de détecter les phrases trop longues, les lourdeurs et les fautes d'accord.
Variez les longueurs de phrases : Alternez phrases courtes (percutantes) et phrases longues (pour l'analyse détaillée).
Maîtrisez les articulateurs logiques : "Cependant", "en effet", "par conséquent", "néanmoins" sont les rouages de votre argumentation.
Fuyez les tics de langage : "Au niveau de", "voilà", "du coup" affaiblissent votre style.
Consultez un dictionnaire : Un bon dictionnaire (comme le Trésor de la Langue Française en ligne) ou un dictionnaire des synonymes est votre meilleur ami.
Résumé
La grammaire et le style sont les piliers de l'expression universitaire. Au-delà de la simple correction, leur maîtrise permet de nuancer, de persuader et de démontrer une pensée critique. Une syntaxe variée et maîtrisée, un vocabulaire précis et une ponctuation adaptée sont les outils indispensables pour produire des écrits clairs, crédibles et efficaces.
Examen Modèle avec Corrigé
Texte à étudier :
« Le vent s’était levé, brutal, chassant devant lui des nuages lourds et gonflés de pluie. Les quelques promeneurs qui s’attardaient encore sur la digue se hâtaient maintenant, courbés en deux, leurs manteaux battant comme des ailes brisées. Elle, pourtant, restait immobile, le regard perdu au loin, là où la mer et le ciel gris ne faisaient plus qu’un. Avait-elle seulement conscience de l’orage qui montait ? Peut-être. Sans doute même y trouvait-elle une étrange forme d’apaisement, comme si ce chaos répondait à celui qui grondait en elle. »
Consignes :
Relevez deux indicateurs de l'énonciation et précisez leur valeur.
Transformez le discours direct libre ("Avait-elle seulement conscience...") en discours indirect.
Identifiez une proposition subordonnée et donnez sa nature et sa fonction.
Justifiez l'emploi des temps et des modes dans le passage.
Question de synthèse : En quoi le style de ce passage sert-il à opposer le personnage féminin à son environnement ?
Corrigé de l'Examen Modèle
Indicateurs de l'énonciation :
« pourtant » : C'est un connecteur logique (adverbe) qui marque une opposition. Il souligne le contraste entre le comportement des "promeneurs" et celui du personnage féminin.
« Sans doute » : Cette locution adverbiale marque le point de vue de l'énonciateur/narrateur. Elle introduit une hypothèse, une déduction sur l'état d'esprit du personnage, créant une forme de subjectivité et d'intériorité.
Transformation discours indirect :
Phrase originale (direct libre) : "Avait-elle seulement conscience de l’orage qui montait ?"
Discours indirect : Le narrateur se demandait si elle avait seulement conscience de l’orage qui montait.
Proposition subordonnée :
Exemple : « qui s’attardaient encore sur la digue »
Nature : Proposition subordonnée relative.
Fonction : Elle complète le nom "promeneurs" dont elle est l'expansion. Elle a une fonction adjective (elle qualifie les promeneurs).
Justification des temps et modes :
Imparfait ("s'était levé", "chassant", "s'attardaient", "se hâtaient", "restait", "grondait") : C'est le temps de la description, de l'arrière-plan, des actions en cours dans le passé. Il peint le décor et l'atmosphère générale de la scène. "Grondait" à l'imparfait décrit un état intérieur durable.
Plus-que-parfait ("s'était levé") : Il exprime une antériorité par rapport à l'imparfait. Le vent s'était levé avant que la scène décrite ne se déroule.
Participe présent ("chassant") : Il exprime une action simultanée à celle du verbe principal et a une valeur descriptive active.
Conditionnel ("trouvait-elle") : Dans ce contexte, il n'exprime pas une condition mais une atténuation ou une hypothèse polie de la part du narrateur. Il s'agit d'une supposition nuancée sur les sentiments du personnage.
Synthèse (éléments de réponse) :
Le style construit une opposition frontale entre l'environnement et le personnage.Pour l'environnement : Le style est dynamique et violent (verbes d'action : "chassant", "battant"; adjectifs forts : "brutal", "lourds", "brisées"). Les phrases sont construites autour d'actions.
Pour le personnage : Le style devient statique et intérieur ("restait immobile", "regard perdu"). Le rythme change avec des questions et des hypothèses qui plongent dans sa conscience ("Avait-elle...?", "Peut-être", "Sans doute").
Les outils grammaticaux comme l'adverbe d'opposition "pourtant" et le conditionnel d'hypothèse scellent cette opposition. La syntaxe elle-même, en passant de la description objective au questionnement subjectif, mime cette rupture entre le chaos extérieur et l'apaisement intérieur supposé.

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