Le Théâtre du XVIIe Siècle : Un Apogée Classique
Le XVIIe siècle en France, souvent appelé « le Grand Siècle », est marqué par l'absolutisme royal de Louis XIV et l'émergence d'un mouvement culturel et artistique d'une rare intensité : le classicisme. Le théâtre en est la manifestation la plus éclatante. Dominé par les génies de Corneille, Racine et Molière, il a produit des œuvres qui définissent encore aujourd'hui notre conception de la tragédie et de la comédie. Cet article vise à vous fournir les clés pour comprendre, analyser et apprécier ce patrimoine littéraire.
Questions et Réponses (Pour comprendre les bases)
Q1 : Quelles sont les deux grandes catégories de théâtre au XVIIe siècle ?
R : La tragédie et la comédie. La tragédie met en scène des personnages nobles (rois, héros) aux prises avec des passions fatales et des dilemmes moraux, conduisant souvent à la mort. La comédie représente des personnages de condition moyenne ou basse, critique les défauts humains et les travers de la société, et se termine bien (généralement par un mariage).
Q2 : Quels sont les trois dramaturges majeurs de cette période ?
R :
Pierre Corneille (1606-1684) : Le père de la tragédie classique française, auteur du Cid.
Jean Racine (1639-1699) : Le maître de la tragédie psychologique, auteur de Phèdre.
Molière (1622-1673) : Le génie de la comédie, auteur de Tartuffe, L'Avare et Le Misanthrope.
Q3 : Qu'est-ce que la règle des trois unités ?
R : Une règle centrale de la doctrine classique, popularisée par Boileau, qui impose :
Unité d'action : Une intrigue principale, sans action secondaire superflue.
Unité de temps : L'action doit se dérouler en 24 heures.
Unité de lieu : L'action doit se dérouler en un seul lieu.
Q4 : Qu'est-ce que la bienséance ?
R : Un principe qui exige que ce qui est représenté sur scène ne heurte pas la sensibilité du public. La violence (meurtres, batailles) et les gestes grossiers doivent être racontés, non montrés. Les personnages doivent aussi agir selon leur statut social.
Q5 : Qu'est-ce que la vraisemblance ?
R : L'action et les comportements des personnages doivent être crédibles et conformes à ce que le public de l'époque considérait comme plausible, même si le sujet est mythologique ou historique.
Questions de Critique et d'Évaluation d'Opinion (Pour développer un point de vue)
La rigidité des règles classiques (comme les trois unités) est-elle selon vous un frein ou un stimulant pour la créativité des dramaturges ? Justifiez votre réponse en prenant l'exemple d'une pièce.
Molière prétendait "corriger les vices des hommes en les divertissant". Pensez-vous que le rire au théâtre soit une arme efficace pour critiquer la société ? Cette fonction est-elle toujours d'actualité ?
Les tragédies de Racine, centrées sur des passions destructrices, parlent-elles encore au public du XXIe siècle ? Ou sont-elles perçues comme trop éloignées de nos préoccupations modernes ?
La comédie de Molière vous semble-t-elle parfois cruelle (en raillant un malade dans Le Malade imaginaire ou un vieillard dans L'Avare) ? Où placez-vous la limite entre la satire légitime et la moquerie blessante ?
Questions d'Analyse d'Opinion et d'Arguments (Pour décortiquer un discours)
Lors de la "Querelle du Cid", les détracteurs de Corneille (comme Scudéry) ont accusé la pièce de manquer de vraisemblance et de bienséance. Quels arguments ont-ils utilisé ? Inversement, quels arguments ont été employés pour défendre la pièce ?
Dans la préface de Tartuffe, Molière défend farouchement sa pièce contre ceux qui l'accusaient d'impiété. Quelle stratégie argumentative utilise-t-il ? (e.g., se placer du côté de la raison et du roi, distinguer la religion de l'hypocrisie).
Analysez le débat entre les Anciens et les Modernes à la fin du siècle. Les "Anciens" (comme Racine) prônaient l'imitation des modèles grecs et latins. Les "Modernes" (comme Perrault) estimaient que leur siècle pouvait les surpasser. Quels étaient les fondements de leurs positions respectives ?
Questions de Synthèse et d'Évaluation (Pour lier les connaissances)
Comparez la vision de l'amour et du devoir dans Le Cid de Corneille et Phèdre de Racine. En quoi ces différences illustrent-elles l'évolution de la tragédie classique ?
Synthétrisez les raisons pour lesquelles le théâtre du XVIIe siècle est considéré comme l'incarnation de l'idéal classique. (Pensez au contexte politique, aux règles, aux thèmes abordés, au public).
Évaluez l'héritage du théâtre de Molière. En quoi ses personnages (Harpagon, Tartuffe, Alceste) sont-ils devenus des archétypes universels ? Comment son œuvre influence-t-elle encore le théâtre comique aujourd'hui ?
Conseils pour Réussir votre Analyse
Lisez la pièce en intégralité : Ne vous fiez pas uniquement aux résumés.
Connaissez le contexte : La vie de l'auteur, la date de création, le public visé et les événements historiques (comme la Fronde) éclairent souvent le sens d'une œuvre.
Identifiez la structure : Repérez l'exposition, le nœud de l'action, les péripéties, le climax et le dénouement.
Analysez les procédés littéraires : Les stichomythies (répliques coupées), les tirades, les apartés, les monologues et le vocabulaire utilisé sont porteurs de sens.
Pensez à la mise en scène : Même si vous lisez la pièce, essayez d'imaginer comment elle serait jouée (déplacements, tons, costumes).
Résumé
Le théâtre du XVIIe siècle français, sous l'égide du classicisme, cherche à représenter la nature humaine de manière idéalisée et ordonnée. Guidé par des règles strictes (trois unités, bienséance, vraisemblance), il explore les passions humaines dans la tragédie (Corneille, Racine) et critique les défauts sociaux dans la comédie (Molière). Soutenu par le pouvoir royal, il atteint une perfection formelle et une profondeur psychologique qui en font un pilier de la littérature mondiale.
Examen Modèle avec Corrigé
Sujet : En quoi Phèdre de Jean Racine est-elle une tragédie classique ?
Votre copie (Corrigé modèle) :
Introduction
[Accroche] Depuis l'Antiquité, la tragédie a pour but de provoquer terreur et pitié chez le spectateur. [Présentation du sujet] Au XVIIe siècle, Jean Racine porte ce genre à son apogée en France avec Phèdre, créée en 1677. [Problématique] Si le sujet est emprunté à la mythologie grecque, la pièce incarne parfaitement les codes et l'esprit du classicisme français. [Annonce du plan] Nous verrons d'abord comment elle respecte scrupuleusement les règles formelles, puis comment elle explore la psychologie des passions pour enfin révéler une dimension morale et universelle.
I. Le respect rigoureux des règles classiques
A. Les trois unités : L'action se déroule en un seul lieu (le palais de Trézène), en une seule journée (l'unité de temps est palpable par l'urgence qui étreint les personnages), et autour d'une seule intrigue : l'amour coupable de Phèdre pour Hippolyte.
B. La bienséance : La mort d'Hippolyte, déchiré par ses chevaux, n'est pas montrée sur scène. Elle est racontée dans un réit célèbre par Théramène, permettant de décrire l'horreur tout en respectant la décence.
C. La vraisemblance : Bien que mythologique, les passions des personnages (jalousie, remords, honte) sont profondément humaines et crédibles.
II. L'analyse des passions humaines
A. Le conflit intérieur : Phèdre est déchirée entre sa passion dévorante ("C'est Vénus toute entière à sa proie attachée") et sa raison, son sens de l'honneur et sa culpabilité. Ce conflit est au cœur de la tragédie racinienne.
B. La fatalité : Les personnages semblent prisonniers d'un destin implacable. Phèdre est victime de la malédiction de Vénus, ce qui ne la dédouane pas pour autant de sa responsabilité.
C. Le langage de la passion : Racine utilise un vers (l'alexandrin) d'une pureté et d'une musicalité parfaites pour exprimer la violence des sentiments.
III. Une dimension morale et universelle
A. La catharsis : En assistant à la chute de Phèdre, le spectateur est purgé de ses propres passions par la pitié et la crainte qu'elle inspire.
B. La leçon morale : La pièce met en garde contre la démesure des passions et montre les conséquences catastrophiques de la transgression des lois divines et morales.
C. L'universalité : Le personnage de Phèdre dépasse son cadre mythologique pour incarner toute personne rongée par un amour impossible et destructeur.
Conclusion
[Bilan] Phèdre de Racine constitue donc l'archétype de la tragédie classique par son respect formel des règles, sa plongée vertigineuse dans l'âme humaine et sa portée morale universelle. [Ouverture] Cette perfection a parfois été critiquée pour sa rigueur, annonçant déjà les bouleversements esthétiques qui mèneront, au siècle suivant, au drame romantique.

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